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TOUTES LES RAISONS DE CROIRE
Les moines
n°126

Pouilles (Italie)

1887 – 1968

Saint Padre Pio : les merveilles de Dieu à travers « un humble frère qui prie »

Le Padre Pio, « pauvre frère qui prie » selon ses propres mots, est l’un des plus grands saints. Il reçoit dès l’enfance des grâces spéciales, mais il est aussi souvent violemment attaqué par le démon – un combat qui durera toute sa vie. Il entre chez les Capucins en 1903 et est ordonné en 1910. Sa vie, jalonnée de phénomènes inexplicables, analysés et reconnus, est également marquée du sceau de la charité. L’hôpital qu’il a réussi à bâtir avant sa mort, le 23 septembre 1968, malgré une foule d’obstacles, n’en est pas la moindre preuve. La cérémonie de la canonisation de Padre Pio en 2002 par Jean-Paul II a rassemblé 150 000 fidèles place Saint-Pierre à Rome.

Padre Pio parmi les fidèles. / © CC0/wikimedia
Padre Pio parmi les fidèles. / © CC0/wikimedia

Les raisons d'y croire :

  • Les plaies de la Passion reçues par le Padre Pio, d’abord objet d’une polémique, ont été rigoureusement analysées et authentifiées comme surnaturelles, notamment par le Docteur Festa le 10 octobre 1919 : elles ne sont pas le fruit de l’imagination du moine, et n’ont pas été causées par automutilation. Le docteur souligne que les plaies n’ont jamais varié avec le temps, et qu’elles ne suppurent pas ni ne s’infectent, comme le ferait une plaie naturelle.
  • Une caractéristique incroyable de ces stigmates tient au fait qu’ils ont disparu mystérieusement le 22 septembre 1968, quelques instants avant la célébration de la dernière messe de Padre Pio. L’un des médecins appelés à son chevet déclare ce jour-là qu’il s’agit d’un « fait hors de toute typologie de comportement clinique, et de caractère extra-naturel ».

  • Les manifestations diaboliques récurrentes dont il fut victime n’ont à ce jour pas d’autres explications scientifiques (objets se déplaçant seuls, lit renversé, bruits insolites, coups portés au visage et au corps, etc.).
  • Les bilocations de Padre Pio, qui ont toutes un objectif spirituel, ont été attestées sans l’ombre d’un doute. De nombreux témoignages démontrent sa présence à deux endroits en même temps : il intervient à des kilomètres de son couvent tout en restant dans sa cellule en prière. Par exemple, il empêche ainsi le suicide d’un officier italien durant la guerre. 
  • Les guérisons constatées de son vivant et après sa mort par son intercession – souvent de maux incurables diagnostiqués par les médecins avec force détails –, sont complètement attestées. Pour sa canonisation, 73 témoignages de guérison sont réunis, relatés en 104 volumes.
  • Nombre de ses prophéties se sont réalisées, comme celle de 1947 par laquelle il informe un jeune étudiant polonais du nom de Karol Wojtyla qu’un jour, il sera pape.
  • Pour la seule année 1963, plus de 100 000 personnes se sont inscrites pour être reçues par lui en confession. Padre Pio fait usage du don de clairvoyance pour aider les pénitents : très nombreux sont ceux qui racontent le bouleversement radical vécu en confession avec Padre Pio, qui lit dans leur âme.
  • Le couvent dans lequel réside Padre Pio reçoit énormément de dons. Aucun ne profite personnellement au moine, et tout est utilisé pour la construction d’un hôpital qui soigne actuellement près de 60 000 personnes chaque année. Il est manifeste que Padre Pio n’agissait pas par intérêt personnel.
  • Exposé à la vénération des fidèles dans la crypte de San Giovanni Rotondo (Pouilles, Italie), le corps de saint Padre Pio reste incorrompu depuis 55 ans.
  • Pendant un demi-siècle, des foules immenses ont rendu visite au saint, sans que jamais personne, clerc, médecin, théologien, autorités politiques ou scientifiques, ne détecte une attitude douteuse ou une quelconque tromperie chez Padre Pio. Il a pourtant été passé au crible, la popularité du moine étant problématique.
  • Les phénomènes constatés (stigmates, parfums extraordinaires, visions, locutions, don de clairvoyance, bilocations, etc.) ne sont jamais des prodiges « gratuits » : tous, sans exception, sont des signes et des instruments au service de l’Évangile, en parfaite cohérence avec l’enseignement de l’Église.
  • Le Padre Pio porte un regard en tout point conforme à celui de l’Église sur les expériences qu’il vit. À ses yeux, elles restent secondaires, marginales et subordonnées à l’essentiel : l’amour du Christ.
  • Malgré les mesures disciplinaires qui lui sont imposées de 1922 à 1964, le futur saint est resté totalement obéissant à ses supérieurs directs et à la hiérarchie ecclésiastique dans son ensemble.

Synthèse :

Francisco Forgione vient au monde en 1887 à Pietrelcina, village italien près de Bénévent, en Campanie, au sud de Rome. Quatrième enfant de Grazio Forgione et de Maria Giuseppa Di Nunzio, modestes travailleurs agricoles, il est élevé au grand air, mais sa santé est chancelante : l’enfant est sujet à un sommeil perturbé et des accès de fièvre le fatiguent anormalement. C’est un garçon aimant la solitude, la nature, le recueillement. Son père le croit incapable de devenir paysan, étant donné sa fragilité physique. Cette constatation est providentielle : lui rêve de devenir religieux en prenant l’habit des Capucins.

Après le départ de son père pour l’Amérique, il est confié par sa mère à un oncle, prêtre, don Pannullo. Celui-ci obtient son admission chez les Capucins de Morcone (Italie). Le 22 janvier 1903, après avoir dit adieu aux siens, le jeune homme franchit la porte du monastère. Dès cette époque, le futur saint est touché par des grâces mystiques. Il a trois visions avant même d’embrasser la vie religieuse. Les premières bilocations sont attestées. Ces phénomènes ne l’empêchent jamais d’accomplir ses devoirs religieux et de participer à la vie communautaire. Au contraire : il est un excellent religieux, et ses frères l’estiment et le servent comme il les sert dans la foi et le détachement.

La vie quotidienne est dure : inconfort, absence de commodités, les rares déplacements sont effectués à dos d’âne ou en charrette ; l’alimentation est frugale et le sommeil est interrompu chaque nuit par la liturgie des heures. Étrangement, sa santé toute relative résiste à ce genre de vie. Il n’éprouve nul regret, fondant son engagement sur l’exemple de Jésus de Nazareth.

Après sa réussite aux examens, il prononce ses vœux définitifs le 27 janvier 1907. Commence alors une période étrange pour lui, pleine de phénomènes extraordinaires, mais aussi de souffrances et de contradictions. D’abord, il souffre de maux divers. Une broncho-alvéolite au poumon gauche le contraint à quitter le monastère temporairement (mais presque une année entière), pour recevoir des soins appropriés. Puis les médecins l’autorisent à reprendre la route du cloître. Il est bientôt ordonné sous-diacre. Mais il fait une rechute six mois plus tard qui l’oblige à retourner dans sa famille des mois durant. L’un de ses maîtres, le père Bernardino, dit alors de lui qu’il se distingue non par son intelligence mais par son humilité, sa douceur et son obéissance.

Ensuite, les attaques du démon se font de plus en plus fortes. Elles sont de deux ordres : intérieures (tentations d’abandonner la vie contemplative, de haïr le clergé...), ou extérieures : objets se déplaçant seuls, encrier jeté contre un mur de sa cellule, lit renversé, bruits insolites dont la source est indéfinissable, coups portés au visage et au corps, provoquant ecchymoses et hémorragies… Ces manifestations surprennent, bien sûr, mais elles sont assez traditionnelles dans les annales de la sainteté chrétienne.

Certains faits sont glaçants : plusieurs lettres du saint adressées à ses supérieurs sont retrouvées blanches, pleines de ratures ou de taches d’encre. Il reçoit un jour la visite de son directeur spirituel, le père Agostino da San Marco in Lamis, dans sa chambre, à Pietrelcina. Sa venue étonne le jeune capucin, car ce prêtre n’a pas l’habitude de venir jusqu’à lui sans prévenir. Immédiatement, le visiteur tente de le persuader de renoncer à la vie religieuse, sous prétexte que ses austérités dépassent ses capacités naturelles ; pour finir, il lui explique que ses phénomènes extraordinaires sont le fruit de sa psychologie débridée… Surpris, le frère Pio, demande au Christ de l’éclairer. Un instant plus tard, il propose à son visiteur de prier le Saint Nom de Jésus : « Vive Jésus ! » À ces mots, le père disparaît littéralement en un instant.

Le 10 août 1910, il est ordonné prêtre dans la cathédrale de Bénévent. Après quelques heures passées avec les siens, le diable, qu’il surnomme « Barbe-Bleue », ou le « Moustachu », contre-attaque. Cette fois, le jeune capucin est victime jour et nuit de tentations et d’obsessions diverses. Sa correspondance de l’époque évoque précisément des manifestations externes identiques à celles déjà évoquées par d’immenses saints au cours des siècles, de saint Antoine d’Égypte († 356) au saint curé d’Ars († 1859).

Parallèlement, il est chaque jour plus proche de Dieu, dans la prière, l’ascèse, l’oubli de soi. Bien qu’il n’ait jamais reçu un enseignement approfondi en la matière, sa capacité de discernement laisse sans voix : « Ces faveurs célestes ont produit en moi […] ces trois résultats : une connaissance de Dieu, de son incroyable grandeur ; une grande connaissance de moi-même et un profond sentiment d’humilité. »

D’aucuns ont cru attribuer les stigmates du Padre Pio à un effet de son imagination ou à un acte d’automutilation. Dans un cas comme dans l’autre, ces hypothèses ne reposent sur rien. D’une part, sa psychologie ne présente aucun trait de morbidité ou de dolorisme. C’est un homme parfaitement équilibré, comme l’attestent les multiples rapports médicaux établis à partir de 1919. Le 10 octobre 1919, le Docteur Festa indique, après examen, une origine non naturelle des stigmates. Il visitera le frère Pio jusqu’en 1925, indiquant que les plaies n’ont jamais varié avec le temps, et, de surcroît, ne suppurent pas ni se s’infectent, comme n’importe quelle plaie naturelle. D’autre part, l’évolution clinique des plaies, loin d’être fortuite, épouse un calendrier particulier : elles ne s’ouvrent pas avant le 20 septembre 1918, date à laquelle il a rejoint le couvent de San Giovanni Rotondo, après avoir été déclaré inapte au service militaire pour des raisons de santé ; et elles disparaissent seulement le 22 septembre 1968 lors de la célébration de sa dernière messe – phénomène dont se rendent compte les religieux peu après. L’un des médecins appelés à son chevet déclare ce jour-là qu’il s’agit d’un « fait hors de toute typologie de comportement clinique, et de caractère extra-naturel ».

À partir de là, les événements du couvent de San Giovanni Rotondo prennent un cours très différent. Bien que le saint dissimule les blessures de ses mains à l’aide de mitaines, la nouvelle de sa stigmatisation va faire boule de neige dans la région ; et ce sont bientôt des centaines de fidèles qui accourent au couvent pour voir, entendre et toucher le saint moine.

Comme cela se passe habituellement lorsque Dieu se rend présent d’une manière forte, le diable redouble de violence : des milliers de vies de saints en témoignent. Une rumeur mettant en cause la bonne foi et la moralité du Padre Pio voit le jour. Les responsables locaux s’émeuvent du trouble occasionné par le pèlerinage spontané autour du couvent. La presse locale puis nationale s’en mêle. Le saint accède bien malgré lui au rang de vedette. Un service de tri postal est mis sur pied dans la communauté, tant les lettres parvenant au couvent sont nombreuses. Ici et là, on commence à essayer de dérober un objet, un bout de vêtement lui appartenant, et même des poils de barbe… Plus tard, une rumeur calomnieuse enfle et parvient au Saint-Office : les capucins se battent à l’arme blanche pour faire main basse sur les dons récoltés par le saint ! Le 14 octobre 1920, des affrontements violents à San Giovanni Rotondo entre socialistes et fascistes font 14 morts. On fustige sans raison le Padre Pio, ce « moine obscurantiste ».

Voulant faire cesser ces « débordements », la force publique, aidée en cela par une partie du clergé, prend des dispositions radicales : le saint devra dire la messe dans un lieu privé et il ne pourra plus confesser. C’est le début d’une terrible et longue mise à l’écart que le Padre Pio traverse avec une sérénité surhumaine : jamais personne ne l’a entendu dire un mot négatif sur quiconque. De toute façon, c’est trop tard : la « vox populi » a reconnu la sainteté de l’humble moine. Le 25 juin 1923, malgré les interdictions en vigueur, 5 000 personnes manifestent à la porte du couvent pour demander la levée des sanctions. Peu à peu, la situation s’inverse providentiellement : les principaux détracteurs du saint sont à leur tour accusés de mensonges et de faux témoignages. Au printemps 1934, il retrouve le droit de confesser.

Une autre affaire assombrit bientôt la vie du saint. Des centaines de milliers de fidèles adressent des dons au couvent. Bien sûr, vœu de pauvreté oblige, le saint ne dispose pas de ces sommes. Mais certains l’accusent de s’enrichir grâce à la crédulité populaire. En réalité, ces sommes sont destinées à la construction d’un hôpital équipé de moyens techniques de pointe. En décembre 1949, le gros œuvre est achevé. Le bâtiment est inauguré le 5 mai 1956. Il demeure une œuvre considérable à tous niveaux : toutes les spécialités médicales y sont représentées.

Le frère Pio a 70 ans. Le succès populaire qui est le sien aurait pu faire croire que, désormais, sa vie aurait été tranquille. Au contraire, des accusations infondées, d’une rare violence, parviennent à nouveau jusqu’à la curie romaine. Le saint est à nouveau écarté. L’homme en souffre mais le chrétien, lui, se confie corps et âme à la providence. À aucun moment, il ne désobéit.

À l’été 1959, son courrier est systématiquement ouvert. Des micros sont installés dans les endroits où il confesse. Les écoutes durent quatre mois. Les femmes se confessant à lui ne doivent en aucun cas rester à ses côtés après le sacrement, et le séjour des hommes est autorisé uniquement dans l’église du couvent. En avril 1961, il est dit que sa messe ne doit pas excéder 40 minutes, sans quoi on pourra chronométrer ses longueurs !

Le saint prie de plus belle, se confie à Dieu et à la Vierge Marie qui lui apparaît. Le 10 août 1960, il fête son jubilé d’ordination. En de telles circonstances, il s’attend à vivre cette célébration dans la solitude. Ce jour-là, 20 000 personnes se rendent à San Giovanni Rotondo et 70 évêques italiens lui adressent un message de félicitations, dont un certain Mgr Montini, futur saint Paul VI. À partir de décembre 1962 (première session du concile Vatican II), des dizaines d’évêques séjournant à Rome lui rendent visite. Dieu est fidèle : le 30 janvier 1964, le cardinal Ottaviani informe les Capucins que le pape Paul VI entend redonner une entière liberté à l’humble capucin. 25 000 personnes se confessent à lui en 1967.

Les deux dernières années de sa vie sont un calvaire sur le plan physique mais, contre toute attente, il ne délaisse aucun de ses devoirs. Il célèbre sa messe quotidienne à laquelle assistent, jusqu’à la fin, pléthore de fidèles. Il confesse, conseille et accompagne les plus pauvres d’entre eux.  Sa mort, survenue le 23 septembre 1968, provoque une vague d’émotion en Italie et au-delà. On ne compte plus les gens se rendant à San Giovanni Rotondo pour rendre un dernier hommage à l’humble capucin.

Béatifié le 2 mai 1999, saint Jean-Paul II l’a inscrit au catalogue des saints le 16 juin 2002.

Patrick Sbalchiero


Au-delà des raisons d'y croire :

Sa force de volonté, sa capacité de résilience dans les épreuves, son attachement indéfectible à Jésus, son bon sens et sa charité sans mesure font du Padre Pio un homme certes hors du commun mais surtout un exemple vivant du travail de la grâce dans un cœur ouvert à Dieu.


Aller plus loin :

Patrick Sbalchiero, Petite vie du Padre Pio, Paris, Desclée de Brouwer, 2003.


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