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Histoires providentielles
n°176

Vietnam

21 novembre 1988

Un évêque vietnamien tiré de prison par Marie

Le 21 novembre 1988, cela fait douze ans que Mgr François-Xavier Nguyen Van Thuan, coadjuteur de Saigon (Hô Chi Minh-Ville), est emprisonné. Arrêté le 15 août 1975, il a vu dans cette date la preuve que la Sainte Vierge ne l’abandonnera jamais. Cet espoir, en dépit des conditions d’incarcération souvent épouvantables et d’un isolement presque constant, lui a permis de tenir. Il a l’intime conviction qu’il devra sa libération à Notre Dame, qui lui donnera la preuve de son intervention. Rien, cependant, ne peut lui laisser espérer une délivrance prochaine tant le contexte du moment s’y prête mal. Et pourtant…

© Shutterstock/MIA Studio
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Les raisons d'y croire :

  • Mgr Thuan est considéré par le régime communiste comme « un prisonnier très dangereux » : en plus d’être le neveu de l’ancien président du Sud-Vietnam, Diem, ennemi irréconciliable du communisme, il est également une personnalité charismatique, chef de file de l’Église vietnamienne. En fédérant la résistance au régime autour de lui, il pourrait devenir aussi redoutable que Lech Walesa en Pologne. Cela suffit à justifier son emprisonnement continu.
  • Il possède aussi une valeur diplomatique en raison de ses relations dans le monde occidental et au Vatican. Il est donc un otage dont la sécurité et l’amélioration des conditions de vie sont monnayables pour le Vietnam, qui est isolé sur la scène internationale. On l’utilisera aussi longtemps que possible.
  • En dépit des pressions et mauvais traitements répétés, Thuan n’a jamais reconnu les faits invraisemblables dont il était accusé, et cet échec de la police politique lui vaut la haine de responsables qui voudraient le voir mort et ne le libéreraient pour rien au monde.
  • Inquiet de la déstabilisation de l’URSS provoquée par Gorbatchev et émergeant d’un conflit avec la Chine, le régime, pour ne pas avouer sa fragilité, opte pour un durcissement de la répression des catholiques. Rien ne laisse donc présager un soudain revirement envers le détenu.
  • Sa libération reviendrait à « perdre la face », chose impossible dans les mentalités asiatiques, alors que le gouvernement prend pour une provocation la récente béatification des martyrs du Vietnam.
  • L’archevêque, qui a bénéficié d’un miracle lorsque, tout jeune prêtre, condamné par la médecine, il guérit instantanément d’une tuberculose sur le point de le tuer, conserve une entière confiance en l’intervention de Marie, à laquelle il adresse, à chacune de ses fêtes, cette prière : « Mère, si je suis de quelque utilité à l’Église en prison, faites-moi la grâce et l’honneur de m’y laisser mourir, mais si vous pensez que je peux encore la servir d’une autre manière, faites que mes geôliers me relâchent. » Il garde la certitude que, s’il doit être libéré, ce sera un jour de fête mariale.

  • Pour toutes ces raisons, la décision de libérer Mgr Thuan le 21 novembre 1988 n’a aucune explication rationnelle. Mais on remarque qu’il s’agit d’un jour de fête mariale : la présentation de Marie au Temple.

Synthèse :

Issu d’une famille mandarinale catholique qui a tenu un rôle déterminant dans l’indépendance vietnamienne, François-Xavier Nguyen Van Thuan est né à Hué le 27 avril 1928. Ordonné prêtre en juin 1953, il est peu après miraculeusement guéri d’une tuberculose qui lui laissait peu d’espoir de survie et, s’il n’en mourait pas, le vouait à une vie d’infirme.

Lors d’un pèlerinage à Lourdes, il a le pressentiment d’aller au-devant de grandes épreuves, voire du martyre, comme plusieurs de ses ancêtres, et l’accepte. Remarqué par le Vatican, il est nommé évêque de Nha Trang en 1967 et, s’il fait preuve de grandes capacités d’organisation dans son rôle de pasteur, il attire surtout l’attention des communistes, dont il sait la victoire inévitable.

Après l’effondrement du Sud-Vietnam, en avril 1975, Paul VI le fait coadjuteur de l’archevêque de Saigon – choix que le pouvoir juge inacceptable et qui justifie son arrestation le 15 août. Suivent douze années de captivité, durant lesquelles Mgr Thuan est transféré d’une prison ou d’un camp à un autre, soumis à un isolement parfois total et à des privations sensorielles comparables à de la torture. Drogué, il résiste, soutenu par sa foi et par des locutions du Christ qui lui indiquent la route à suivre pour faire de ce cauchemar une grâce pour l’Église et lui-même.

Le 21 novembre 1988, à l’improviste, Thuan est conduit chez le ministre de l’Intérieur qui ordonne sa libération immédiate, à la stupeur de son entourage. Il n’en reste pas moins soumis à une surveillance, ce qui finit par convaincre Jean-Paul II, inquiet pour la vie de son évêque, de l’appeler à Rome. Interdit de séjour au Vietnam, Thuan est nommé vice-président, puis président du conseil pontifical Justice et Paix. Il devient cardinal en 2001 ; il jouira peu de cette dignité puisque – sa santé altérée par la détention – il meurt d’un cancer à Rome le 16 septembre 2002. Il est aujourd’hui vénérable.

Spécialiste de l’histoire de l’Église, postulateur d’une cause de béatification, journaliste pour de nombreux médias catholiques, Anne Bernet est l’auteur de plus d’une quarantaine d’ouvrages pour la plupart consacrés à la sainteté.


Aller plus loin :

Mgr François-Xavier Nguyen Van Thuan, J’ai suivi Jésus, Médiaspaul, 1998.


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